Hommage, Bella Ciao…

Toi l’étranger mystère
Ta voix vient des éthers
L’ébène a ton front discret
Le violon pleure en secret
Ton destin
Clandestin !
Était-ce une déroute
Une lettre de cachet en août
Le sceau d’un tyran
Un glaive foudroyant ?

L’exil ou vivre sans parler,
Des mots, des mots pour exister
Des mots rouges, des mots sang
Des mots pour tous les partisans.
La liberté !
L’éternité !
Sur les sentiers de feu
En cendres, les noms de ceux
Tombés en conscience
Au cœur, la vaillance.

Les dictatures ici ou là
Déciment sans combat
Des corps anonymes
Ne sont pas des victimes !
Terrifiés
Humiliés
Combien prennent la fuite
Dans un dédale sans suite
De soif, de mort et de faim ?

Grand-père, je porte en moi la fin !

 

Ce texte est dédié à tous les Italiens qui refusèrent de se soumettre
à la dictature de Benito Mussolini, et à mon grand-père en particulier.
Par extrapolation, je pense à tous ceux qui subissent toute forme de dictature.
Oser simplement parler, c’est mettre sa vie en danger parfois.
Tous les jours des femmes et des hommes meurent pour leurs idées…

4 commentaires.

La métaphore

La métaphore

Enfin ! Un nouvel article dans cette rubrique… Vous l’attendiez ? À vrai dire, moi aussi ! La plume et l’esprit sont capricieux…

La métaphore est avant tout une image très employée, à l’oral comme à l’écrit. Elle est l’image jaillissant du coeur de l’homme qui veut partager son ressenti avec acuité, avec précision.

 Boileau disait qu’on entendait aux halles plus de métaphores en un jour qu’il n’y en a dans toute l’Énéide, [La Harpe,Cours de littér. t. VI, p. 468, édit. DUPONT.] !

Nous y avons consciemment, ou machinalement recours, lorsqu’elle est devenue « cliché ». 

Tenter de la définir est complexe dans la mesure où son champ est vaste, je rappelle que mes objectifs sont de donner un aperçu des figures de style, accessible à tous, non d’en faire le tour : telle est l’ambition des spécialistes. Cf préambule.

Si ces notions te semblent d’emblée rébarbatives, cher Lecteur, je ne t’en voudrais pas et t’invite à lire ma conclusion sur l’acte d’écrire où
« je » se livre à toi.

La métaphore est un trope :

Aborder cette notion est indispensable et me permettra d’évoquer, ultérieurement, d’autres figures où l’écrivain et le poète, pour s’exprimer, modulent le sens des mot en créant leurs propres images.

Un trope, mot vif et court qui ne vient pas de l’italien « troppo » non ! mais du grec «  τρόπος » qui signifie quelque chose comme « conversion, tour ». Du verbe grec « tourner » nous précise Henry Suhamy, universitaire spécialiste de stylistique et de métrique.
Les tropes seraient donc des mots convertis ? Convertis, détournés…

Trope :

définition : qu’en dit le Littré ? « Terme de rhétorique. Expression employée dans un sens figuré. »

À cette définition, il me semble judicieux d’ajouter ce que précise Dumarsais dans son « traité des tropes »

« Les tropes sont des figures par lesquelles on fait prendre à un mot une signification qui n’est pas précisément la signification propre de ce mot. »

Plus intéressants encore sont ces propos, toujours du même auteur :

Il ne faut pas croire que les tropes n’aient été inventés que par nécessité, à cause du défaut et de la disette des mots propres…. les hommes n’ont point consulté s’ils avaient ou s’ils n’avaient pas des termes propres pour exprimer leurs idées, ni si l’expression figurée serait plus agréable que l’expression propre ; ils ont suivi les mouvements de leur imagination et ce que leur inspirait le désir de faire sentir vivement aux autres ce qu’ils sentaient eux-mêmes vivement, [Dumarsais, Tropes, VII, 2]

Tu comprendras qu’ils me soient chers. Et puis, Lecteur attentif, tu ne peux que songer à l’écriture surréaliste… qui demanderait un ou plusieurs articles conséquents…

La métaphore ou l’appropriation du mot par l’écrivain :

Prenons ces vers célèbres de Victor Hugo :

Je ne regarderai ni l’or du soir qui tombe,
Ni les voiles au loin descendant vers Harfleur, extraits de « Demain, dès l’aube… »

Tous deux présentent un trope et nombreux sont ceux qui parleraient de métaphore dans les deux cas. Ce qui est tout à fait vraisemblable.
Néanmoins, si dans le premier vers le poète emploie une métaphore ; dans le second, il utilise une métonymie car les voiles sont une partie des embarcations et cette partie évoque dans notre esprit,  le tout.

Référons-nous à l’étymologie et à la définition de la métaphore :

Étymologie : Du grec, transport, métaphore, (voy. MÉTA-), et du grec, porter.

Définition donnée par Le Littré : « Dans un sens plus restreint, qui est le sens des rhéteurs postérieurs, de Cicéron, de Quintilien et le sens actuel, figure par laquelle la signification naturelle d’un mot est changée en une autre ; comparaison abrégée. Les métaphores ne sont autre chose que des similitudes abrégées. [Bossuet, 6e avert. 82]

Il y a donc dans la métaphore un rapport de ressemblance et « l’or du soir » est le soleil qui ressemble à l’or, par sa couleur. D’ailleurs, cette figure est enseignée aux jeunes écoliers de manière simplifiée comme une comparaison, sans mot de comparaison.

La métaphore : fleur poétique

Ah, je crois bien que c’en est une ! Pourquoi « fleur » ? Parce qu’ elle est ce qui, après avoir germé dans l’esprit du poète, s’épanouit pour traduire son ressenti ; parce qu ‘elle est ce qu’il enfante, ce qu’il crée en s’accaparant le langage, en le labourant, en le brisant, afin de donner vie à l’ inattendu : un nouveau rapport entre les mots et la réalité perçue…

Dans mon poème « va », j’écris :

« Le cœur est un moineau sensible »

j’ai choisi le plus peureux des oiseaux, celui dont le cœur s’affole au point de s’arrêter s’il se sent en danger. Ainsi ai-je voulu évoquer l’organe que nous considérons culturellement comme le siège des sentiments et qui s’émeut de la moindre blessure…

La métaphore filée :

Nous pourrions croire que la métaphore est suivie, en nous amusant avec le sens figuré (être filé)... En fait, elle suit un fil conducteur...

On parle de métaphore filée lorsque l’auteur emploie plusieurs métaphores qui se rattachent à un même « réseau » ou « champ » lexical.

Prenons les deux quatrains du sonnet de Baudelaire « L’Ennemi »

Ma jeunesse ne fut qu’un ténébreux orage,
Traversé çà et là par de brillants soleils ;
Le tonnerre et la pluie ont fait un tel ravage,
Qu’il reste en mon jardin bien peu de fruits vermeils.

Voilà que j’ai touché l’automne des idées,
Et qu’il faut employer la pelle et les râteaux
Pour rassembler à neuf les terres inondées,
Où l’eau creuse des trous grands comme des tombeaux.

Baudelaire évoque sa vie à travers les saisons et les éléments climatiques qui s’y rapportent :
« ténébreux orages, brillants soleils, tonnerre, pluie » etc. autant de métaphores des moments heureux ou des moments de souffrance…

La métaphore commune :

Pourquoi cet adjectif ? Lorsqu’une métaphore est banalisée par son usage, elle devient un cliché. Ainsi « une main de fer » « des yeux de biche » etc.

La métaphore est également employée dans les affiches, les publicités mais il me faudrait écrire plus d’un article pour évoquer ces occurrences…

L’acte d’écrire

J’espère que ta lecture ne fut pas trop rébarbative, toi qui es parvenu jusque là. Crois-moi, j’ai fait mon possible pour extraire les éléments indispensables à la compréhension et j’ai abandonné les termes trop techniques…

J’aimerais conclure sur l’acte d’écriture  et compléter ainsi ce que j’ai pu en dire dans l’article « l’anaphore » au paragraphe « l’acte d’écrire ».

S’ il n’y a pas de règle pour écrire de la poésie, il y a, comme en musique, des accords ou des dissonances, des chants ou des bruits…

Il y a un immense vivier de mots à notre disposition et d’autres à inventer.

Il y a ce que nous ressentons, ce que le cœur, le corps, l’âme et l’esprit ont le désir de libérer, d’exprimer.

Il y a ce que la langue offre dans ses sonorités, sa syntaxe. La poésie m’apparaît comme une rupture, une distorsion de cette syntaxe et une exploration des mots, des sons, pour en tirer un chant personnel, une harmonie intime.

Et puis il y a aussi les jeux de langage : quand l’inspiration me fait défaut, quand ni mon âme ni mon cœur, ni mon corps ni mon esprit ne veulent parler, parce qu’ils se replient ou parce qu’ils refusent de se livrer, je pars des mots eux-mêmes et de ce qu’ils évoquent ou je réagis aux mots et ou aux maux.

Quel procédé de style souhaiterais-tu me voir évoquer ? Tu peux faire des suggestions et me contacter en cliquant sur la petite enveloppe bleue « email » qui figure en bas de chaque texte…

2 commentaires.

Haïkus de soi

Dans l’être de bronze
une fissure révèle
l’humain voit le jour

Nuit noire est le ciel
jaillit la lumière crue
myriades d’étoiles

Esprit prisonnier
le coeur est sous les barreaux
la clé est en soi

Entre sel et sucre
un oeil pleure et l’autre rit
le printemps chancelle

Un rêve qui brûle
cruelle réalité
espoir est la vie

Mystère des mots
plume trempée dans le coeur
multiples artères

Trouée dans le ciel
rai de lumière complice
regards dans les nues

Effleurement d’âmes
lettre après l’être se pâme
douceur d’un instant

Pensée vagabonde
les lèvres au bord des mots
un voile se lève

Présent à rebours
le passé dans les abysses
l’instant est futur

Au coeur d’une histoire
Chronos est toujours vaincu
le rêve a des ailes

 
Ces quelques haïkus sont une expression de soi, cette petite particule au coeur de l’Humain et de l’univers…

Disséminés au gré de mes réponses sur twitter, entre avril et mai, je les ai réunis ici. Voilà pourquoi je les nomme « haïkus de soi », soi étant l’essence d’humanité que je percevais dans les tweets que je lisais…

Commenter.

L’anadiplose

L’anadiplose

Je vous avais annoncé une brève présentation de l’anadiplose, qui, je le rappelle, n’est pas un animal préhistorique. Même si ce terme me semble grandiloquent, lourd et pesant, comme le diplodocus !

Figure de répétition 

Pour vous parler de ce procédé de style, je vais d’abord le situer dans les figures d’insistance et de répétition, tout comme l’anaphore.

Lorsque la répétition n’est pas une maladresse, mais un choix d’écriture, elle devient figure de style.
La répétition souligne et met en valeur, elle permet aussi d’établir des parallélismes entre les mots répétés.
Une autre de ses conséquences, Ô combien riche, dans un poème ou une chanson, est de donner un rythme au texte.
On peut aussi, d’ailleurs, mentionner son effet dans la mise en scène théâtrale où la répétition, jusqu’au ressassement, peut devenir un moteur du comique.

Mais revenons à l’anadiplose.

Étymologie et effets recherchés

Son étymologie : du grec « ana » nouveau et « diploos » double.
Elle consiste donc à répéter au début d’une phrase, d’une proposition ou d’un vers, des mots qui terminent la phrase, la proposition ou le vers précédent.

Ainsi, cette célèbre phrase du regretté Georges Brassens, dans laquelle on peut déceler une légère ironie, n’est-ce pas ?!

« Mourir pour des idées, l’idée est excellente… »

ou dans le premier quatrain de mon poème Étranger familier :

« Mes yeux ne vous voient pas, mais vous êtes ici,
Ici vous êtes bien, par mon anadiplose. »

Là, l’anadiplose établit un lien entre le visible et l’invisible, l’absence, qui est pourtant présence, par la magie des mots et du rêve.
Ces mots, cher lecteur, si riches, si pleins, qui nous échappent parfois, qui nous paraissent si vides, si creux lorsqu’ils sont mal choisis. Ces mots, lecteur, qui constituent un pont invisible entre nous.
Oh, il me semble que je me répète !

L’anadiplose est également employée dans un discours argumentatif, un raisonnement.
On parle alors d’anadiplose de liaison car elle a pour fonction d’introduire la suite du développement.

Pour clore ce petit chapitre, je dirai que l’anadiplose est une version courte, de la concaténation. Encore un mot à consonance douteuse qu’il faudra élucider…

Je te donne un indice  : « catena » signifie chaîne, en latin.

4 commentaires.