Étranger familier -2-

À l’ombre de mes cils, sur un nuage rose,
Monsieur, vous êtes là, comme un rêve imprécis.
Mes yeux ne vous voient pas, mais vous êtes ici,
Ici vous êtes bien, par mon anadiplose.

Mon cœur, lui, vous connaît et votre nom murmure
Et s’enflamme à vos mains, s’anime doucement
Etes-vous follet ou volition seulement ?
D’un parterre fleuri, une ancienne ramure ?

Des jambes, tout du long, au sommet de mon front
L’Hégoa me ravit d’un souffle forgeron.
Un voile évanescent en volutes me couvre.

Venez ! de vos baisers, je sens déjà l’ardeur
Une étrange moiteur lorsque ma bouche s’ouvre
Vous invite : venez ! étranger maraudeur.

À quelques uns qui aimeraient lever le mystère :
Je suis un oeil bienveillant, Cher Lecteur, et tout ce que tu écris est important...
Quant à mon pseudonyme, je te confierai prochainement les raisons de ce choix.

 

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La vieille…

Ce soir il y a comme une lumière
Dans son regard éteint : une chandelle
La réponse à une pieuse prière
Dans son sage fauteuil qui se rappelle…

La lune ronde émoustillait les pins,
Ses pieds légers volaient sur le parquet
À chavirer la valse de Chopin,
Le cœur dans les bras d’un homme coquet.

Sur sa robe s’accrochait une étoile
Le satin s’habillait de sa peau lisse
Dans un sourire, il fit tomber son voile
Au lendemain, un rendez-vous se glisse

Ce soir, l’âme ridée, le corps usé,
Si seule qu’elle a perdu la raison
Elle sait qu’il va venir la chercher
Et se met à coiffer son blanc chignon.

 

L’idée de ce texte est née d’une équivoque due au titre d’un autre de mes poèmes, plutôt sensuel, intitulé « Sise devant la cheminée » devenu, je saisis dans le feu .Un poète, imprégné des vers de Ronsard tirés des « Sonnets pour Hélène » crut entamer la lecture d’un poème sur « une vieille, au coin du feu » et trouva la suite très…surprenante ! Aussi, écrivis-je ensuite ce poème par jeu. Mais progressivement, j’y mêlai quelques réminiscences d’une vieille femme de ma connaissance.

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Un champ de symboles

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Il pleut, l’été pâlit et ma plume est en peine
Les collines au loin coiffées d’un chapeau gris
Dérobent leurs couleurs et la cime d’un frêne
Il pleut.Tout simplement. Pourquoi cet air surpris ?

Dépouillés de tout sens, les mots dans le ruisseau,
Çà et là ballottés comme l’herbe mauvaise,
Refusant de couler, tentent dans un sursaut,
De se hausser, perclus, jusque sur la falaise :

Ne cherchez pas mon cœur, je l’ai bouté dehors
Je ne peux offrir que la cale d’un navire
Désormais vide ! Elle qui contint un trésor
Secret, a perdu l’or qui aurait pu séduire…

Mais ce murmure… Il me semble sentir, Poète,
Sur la nuque, un souffle qui m’effleure, léger,
Est-ce le zéphyr ou bien vos lèvres ? Vous êtes
L’inconnu à la cape, étrange et familier.

Deviser vous et moi, de la pluie, du beau temps,
Des humeurs et du pain ? Au feu de la lanterne,
La magie qui nous frôle est la fleur de printemps ;
D’un champ de symboles, l’invisible poterne.

Poème en alexandrins, hommage au poète et à la magie des mots, qu’il faut savoir parfois préserver…

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Haïkus de soi

Dans l’être de bronze
une fissure révèle
l’humain voit le jour

Nuit noire est le ciel
jaillit la lumière crue
myriades d’étoiles

Esprit prisonnier
le coeur est sous les barreaux
la clé est en soi

Entre sel et sucre
un oeil pleure et l’autre rit
le printemps chancelle

Un rêve qui brûle
cruelle réalité
espoir est la vie

Mystère des mots
plume trempée dans le coeur
multiples artères

Trouée dans le ciel
rai de lumière complice
regards dans les nues

Effleurement d’âmes
lettre après l’être se pâme
douceur d’un instant

Pensée vagabonde
les lèvres au bord des mots
un voile se lève

Présent à rebours
le passé dans les abysses
l’instant est futur

Au coeur d’une histoire
Chronos est toujours vaincu
le rêve a des ailes

 
Ces quelques haïkus sont une expression de soi, cette petite particule au coeur de l’Humain et de l’univers…

Disséminés au gré de mes réponses sur twitter, entre avril et mai, je les ai réunis ici. Voilà pourquoi je les nomme « haïkus de soi », soi étant l’essence d’humanité que je percevais dans les tweets que je lisais…

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Partout où

Écrit il y a quelques années, légèrement retouché, j’ai choisi l’impair
« Plus vague et plus soluble dans l’air » comme dit Verlaine dans
Art Poétique, et l’anaphore. Poème volontairement inachevé, je 
te laisse libre d’imaginer le dernier vers…

Partout où le jour veille les fleurs
Partout où la mer joint l’horizon
Partout où nos pas font les saisons

Sur le front pur d’un amour en pleurs
Sur les blancs sommets cimes au vent
Sur le brasier d’un volcan mourant

Sous la lance qui pourfend mon coeur
Sous les débris des anciens amants
Sous le passé mis en monument

Sur les murs d’un pays de mousson
Dans la puce d’un ordinateur
Sous le sifflet d’un oiseau moqueur

Partout où …

Si tu apprécies l’impair, je t’invite à lire également Écriture et Enroule-moi dans tes cheveux.

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Madame de Tourvel

J’ai écrit ce poème après avoir lu, sur un site de poésie, un texte intitulé Valmont.
Comme j’ai toujours eu une tendresse pour le personnage de Madame de Tourvel,
en inadéquation avec son époque et cette cour que nous dépeint Choderlos de Laclos ,
dans les Liaisons dangereuses, j’ai fait cette réponse, en tentant de saisir les sentiments
de la Dame dans leurs contradictions.

images

Mon esprit se rebelle où mon coeur se consume
Rétif au libertin, offrande au repenti
A mille tourments, mon coeur est assujetti
Je vous implore, Dieu, de briser là ma plume

La lune purpurine, astre de déraison
M’affole, est-ce un défi ? Mon sang, d’amour est ivre
Mon corps est un glacier, brûlant, prêt à le suivre
Vicomte débauché requiert l’absolution.

Ma pudeur qui blêmit frôle le  vermillon
Son regard me soumet, je veux baiser sa bouche
Me laisser allonger tendrement sur sa couche
Valmont transfiguré aux feux de la passion.

Mes mains tremblent pourtant, mon front pâle s’anime
Je l’aime et ne saurai plus longtemps le celer 
Ignorer la missive ou bien capituler ?
Toute à lui je serai, cette nuit anonyme.

 

 

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Derrière le lycée

L’hiver était au sud, les mains sous ton blouson,
L’univers tout entier tenait dans ma semelle :
L’avenir au présent parle à l’âme jumelle.
La chaleur de nos corps était notre maison.

La lune dans mes yeux coiffait tes cheveux blonds,
Le monde était subtil comme un point de dentelle
Brune. Le coeur battant, comme fait l’hirondelle,
Tu cherchais le soleil, paumes sur mes seins ronds.

Au mur, chiffres, lettres, tracés à l’encre rose
Ton désir opprimé contre mon jean qui ose
S’exprimer. Dans mon cou, un “je t’aime” troublé.

Derrière le lycée, encor l’amour murmure,
Un autre garçon à une fille susurre,
Le printemps qui fleurit à l’est d’un champ de blé.

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Il est des regards

Il est des regards transparents
Comme l’eau pure des cascades
Qui coule par lentes saccades
Ils sont francs de toute embuscade.

Des regards clairs et scintillants
Comme un vin joyeux qui pétille
Qui distillent sur les papilles
Un délicat jus de myrtille

Des regards torves et rampants
Comme le sont ceux des faux-frères
Qui tendent la main, insincères
Et brandissent le cimeterre

Des regards d’êtres arrogants
Comme les antiques dieux
Qui se nourrissent de tout feu
Brûlant leur ego vaniteux

Puis il est un regard de l’âme
Comme une naissance au bonheur
Qui arrête soudain les heures.
Les yeux captifs battent d’un cœur.

 

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