Premier rivage…

Mère, premier rivage au sable tiède
Val nourricier où expire, apaisé, le premier cri
Terre d’asile où baigne la lumière
Sur le front blanc de l’enfant immaculée
Ta boussole ne connaît qu’un seul point cardinal : l’amour
Ta main est le chêne tutélaire qui jamais ne vacille

Telle un phare bienveillant
Arrimé à l’oeil des navires qui viennent et vont
Tu lâches prise au vent mais jaillis dans la tempête
Et sur ton sein flétri par les veillées et l’ombre
Les écueils ont la saveur aigre douce du limon
Tes bras abritent un port où le temps n’a plus cours

Première larme
Premier baiser
Premier berceau
Premier sourire
Première parole

Tu es la mémoire vive de ce que je fus, avant de paraître
Le miroir où mon reflet est toujours beau
Où chaque bosse, chaque loupé, chaque colère
Se dissout dans la tendresse
Et dans ton cou de femme plurale, ma mère,
C’est ton odeur bonheur que je respire.

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Le Parfum

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Transformer l’univers en un vaste athanor
Soufre, mercure et sel sous la flamme vermeille
Réduire en poudre les chaînes, la haine et l’or
Pénétrer le puits noir où le mage sommeille

Fermer les yeux dans les bras de la terre mère
Mordre aux fruits défendus et répandre leur jus
Des lèvres goûter, tel l’amant se désaltère
La langue sillonnant le corps aimé et nu

S’enivrer du contact des bois et de la source
Attiser le désir à son point culminant
Sentir, sous ses dents, le temps battu dans sa course
Les paumes sur la chair et le pouls lancinant

S’abandonner, comme le rivage tremblant
Sous le flux régulier des vagues qui le lèchent,
S’imbibe peu à peu, humide et accueillant.
Que l’oeuvre au rouge soit d’amour et de ses flèches.

En écrivant ce texte m’est venu à l’esprit le roman de Patrick Süskind Le Parfum, d’où le titre. Je me disais que si l’on pouvait trouver un parfum qui transforme tous les sentiments humains de haine, de colère, de vengeance en amour, le monde serait idéal…

Chacun est magicien…

 

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Esquisse d’un baiser

 

Furtif et léger
Aux néons de la ville insouciants
Comme la fleur du blanc cerisier
Dérobé aux passants

Sur des lèvres transies
Flocon impertinent
Caresse de l’esprit
Rêve évanescent

Furtif et léger
Juste un éclat de lune
Sur la pointe des pieds
Un mirage nocturne

Sur des lèvres transies
Esquisse à l’encre rose
Désir qui s’écrie
Une bouche qui ose

Furtif et léger
Feuille qui tourbillonne
Le vent l’a emporté
Il n’était pour personne

Sur des lèvres transies
Juste un éclat d’amour
Un fruit gorgé de vie
Envolé pour toujours

Voix : Michel Tissier

 

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Cyrano, derrière ta fenêtre…

Ô ce chant qui roucoule
Où frémit la Garonne
Nougaro qui se roule
Sur la pierre qui fredonne…
La Cité des Violettes
Aux lèvres roses
Sort de sa musette
Une leçon de choses,
Tout un bois de senteurs
Sans l’accent du pays
Verse dans mon cœur
Toute sa panoplie

Le matin me réveille
Dans le lit de ton fleuve
Sortie d’un long sommeil
Ou du voile de la veuve
En félin sur ma peau
Tu inscris tes voyelles
Je tricote les mots
Caresse d’hirondelle
Ô coquins de Gascogne !
L’amour pointe son nez
Et c’est mon pouls qui cogne
Au fil de son épée !

Cyrano me sourit,
Derrière ta fenêtre :
« L’amour logerait ici ?
Frissonne tout mon être… »

Quelques vers nés avec le jour…

 

 

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Braquage…

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Dis-moi, mon bel amour gangster
Qu’on s’est pas mis les fers
Que nos mots des vers gondés
Ne seront jamais estampillés
Que nos joutes hors la loi
Sont en vers ou endroit
Que Verlaine surfe sur l’eau
Qui coule sous Mirabeau
Que les barreaux de cette cage
Ne sont qu’un pur mirage
Que dans les eaux du Nil
Mordent toujours les crocodiles
Que je reste ton prochain braquage
Je ne serai jamais sage…
Dis-moi le vent chaud des îles
La langue de l’océan, subtile
Les longs frissons de peau.
Jetons nos oripeaux !
Sors une flèche de ton carquois
Et d’un tir érectile et matois
Retiens mon regard insolent
Dans la ferveur de ton sang.

Dis-moi… et à la prochaine saison, je serais ton moussaillon…

Photo prise au fil du Tarn.

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Je saisis dans le feu…

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La cheminée dorant mes cheveux dénoués
Laisse mon dos presser ton torse chaleureux
Ta bouche sur mon cou, et tes mots enroués
Font palpiter mon cœur d’un élan amoureux

L’ombre de ta main en conque sur mon sein rose
Frôle de son babil un téton trop rebelle
Ma croupe s’anime et semble chercher sa pose
Aux dessins des faisceaux sur mon buste en dentelle

Chaque grain est repeint jusqu’à l’incandescence
L’artiste de ses doigts inspirés par la source
Dans un chenal étroit où naquit l’existence
Imprègne tous ses sens et la tiédeur est douce…

Ouverte à la langueur, je saisis dans le feu
Le reflet de tes yeux qui me met au tapis
Une langue en pinceau, tant ferme que soyeux,
Tourmente tous les plis et fait monter le cri…

 

Que dire sur ce texte sinon que je n’ai plus de cheminée ! Le feu de cheminée exerce sur moi une fascination apaisante et sensuelle.

Le titre initial était « Sise devant la cheminée » Cf explications sur le poème publié précédemment La vieille  ; j’ai remanié ce poème, ce qui n’est pas toujours simple si l’on veut conserver le ressenti, aussi dirais-je comme Baudelaire dans Le Balcon :

« Je sais l’art d’évoquer les minutes heureuses »

Tu remarqueras, cher Lecteur, qu’il est en alexandrins et que les deux quatrains en rimes féminines sont enclos par deux quatrains en rimes masculines, à toi de rapprocher ce choix de forme, du fond.

 

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Va…

Va

Ne te retourne pas

Pas encore. Écoute l’aurore

L’aurore est bleue,

Bleue comme un dimanche sans rime,

Un dimanche qui s’endort.

Va

Franchis la porte

La porte où bâille la tendresse

La tendresse est pure,

Pure comme l’azur d’un jour sans fin,

Un jour qui sait.

Va

Je ne te suivrai pas

Pas cette fois. Je reste sur le quai

Le quai des mots perdus,

Perdus comme la lettre qu’on n’attend plus,

La lettre, que je n’écrirai pas.

Va

L’amour est une longue tresse

Une tresse couleur du cœur,

Le cœur est un moineau sensible,

Sensible comme la pupille levée vers le soleil,

La pupille qui reflète l’ ombre.

 

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L’Amoureuse (non ce n’est pas d’Éluard)

Joyeuse, pensive, prolixe ou silencieuse

Tout mon être tressaille, éperdu d’émotions,

Passant des larmes au fruit amer de la passion.

De l’impatience violente

À l’attente choisie ;

Du réel au rêvé, du lever au coucher,

De la Foi aux affres du doute,

Des caprices de l’esprit

Aux désirs de la chair…

Noyée dans un ciel mou,

Sous la paume d’une main,

À l’ourlet d’une bouche :

Je ris, je pleure, j’ai envie et j’ai mal…

J’ai tenté d’exprimer dans ce poème, la pluralité paradoxale des émotions qui nous agitent quand on est amoureux…

Cet état où l’on se sent pousser des ailes tout en se sentant gauche, où l’on se repasse le film des rencontres inlassablement mais où on peut également faire des bêtises à s’en mordre les dix doigts.

Cet état intensément sublime et vivant lorsqu’il est partagé, qui peut tracer le chemin de l’amour ou s’éteindre comme un feu de bois vif, devenu cendres…

J’avais écrit trois de ces vers il y a quelques années puis abandonné l’idée d’un texte…

 

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La biche au bois

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Sous ton masque de loup, tu te prétends lion
Nue, dans le sous-bois, je ne crains la morsure
De tes yeux pers; pourtant, je cache la césure…
Pour me rendre à la vie, es-tu Pygmalion?

Ta bouche a le parfum de la menthe sauvage
Cueillie sous le ciel bleu, à l’ombre d’un été
Tes mots dans mes cheveux défient l’éternité
Et le désir, ardent, souffle dans le feuillage

Quand, sur le sein gauche, ta paume vacillante
Sonde un cœur virginal, et, qu’au coup de minuit
Redevenue biche, je me fonds dans la nuit,
L’aube se fait rubis sur front d’adolescente.

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Déshabille mon coeur

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Aime-moi sans pudeur, déshabille mon cœur.
Sur un lit de fortune ou un quartier de Lune
Love-toi sur ma dune ô mon Soleil nocturne,
Mon astre dévoyeur aux accents purs d’un choeur

Aux confins de la nuit, deviens mon insomnie.
Le temps s’est arrêté dès nos premiers baisers,
Nos âmes envoûtées sont enfin accordées,
Et le lit de nos vies est un puits d’ambroisie.

La chaleur de tes mains enveloppe mes seins
Le présent est l’instant, qui, dans notre être, vibre.
L’étoile du ponant scintille à nouveau, libre
La flamme dans tes yeux est l’aveu d’un dessein.

Ta langue murmure des délices, complice,
Tendre mélopée à mes lèvres emperlées,
Les coussins, dépités, se sont tous écartés :
À nos pieds, l’un, jaloux, se glisse dans la lice…

 

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