Au large de Lampedusa

Le ciel rugit
Les nuages éventrés crèvent
Ventre tiré, un tambour résonne
Les cordages crissent
Un mât dérape et frappe
Les dieux sont sourds

Des débris de bois valsent
Sur la mer, couleur terre
Bourrasque divague
Cris en rafales
Des hommes sans amarre
Giboulées d’horreur

Les rouleaux avalent leurs proies
Clandestins aux abois
Coulent
Faux pays de Cocagne
Vingt mille lieues sous les mers
L’espérance est amère

Le silence hurle sa détresse
Charybde, Scylla
Ultime adresse
Frontières de l’indifférence
Né ici ou là
Au revers de la chance.

Je dédie ces vers à tous ceux, quels que soient leur nationalité, leur âge ou leur sexe, qui fuyant la misère ou la tyrannie ou bien souvent les deux, sur des embarcations payées au prix fort, ne finissent pas le voyage et trouvent la mort.
Je pense aussi à leur famille, restée au pays et à leur souffrance…
Et si vous ne connaissez pas le livre de Laurent Gaudé Eldorado, je vous suggère de le lire : concis, sobre, il donne une approche personnelle de ces naufragés de la vie, de la société, de l’humanité.

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Ce soir, le Vent

Tu es venu à moi comme une lune pourpre
Chassé du firmament, tu cherchais un chemin
J’avais un œil fermé, je scrutais le destin
Tu as cueilli mes mots, dans la nuit, parfois âpre.

La poudre rouge sang semée sur ton passage
A fait trembler le temps et j’ai ouvert les yeux :
Une âme dans le noir, brillait de mille feux,
Un ange allait blessé, perdu dans mon sillage.

Exaltant les couleurs de ta plume puissante,
Abritant un jardin où la lumière croît,
Tu vas tel un enfant, tu es simplement toi
L’enfer sera vaincu par l’ étoile filante…

Ce soir le Vent s’est tu, au loin, il pantomime
Ce soir le Vent me parle, il écrit ses desseins
Ce soir le Vent sourit, il est herculéen
Ce soir le Vent compose, il sublime la rime.

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Madame de Tourvel

J’ai écrit ce poème après avoir lu, sur un site de poésie, un texte intitulé Valmont.
Comme j’ai toujours eu une tendresse pour le personnage de Madame de Tourvel,
en inadéquation avec son époque et cette cour que nous dépeint Choderlos de Laclos ,
dans les Liaisons dangereuses, j’ai fait cette réponse, en tentant de saisir les sentiments
de la Dame dans leurs contradictions.

images

Mon esprit se rebelle où mon coeur se consume
Rétif au libertin, offrande au repenti
A mille tourments, mon coeur est assujetti
Je vous implore, Dieu, de briser là ma plume

La lune purpurine, astre de déraison
M’affole, est-ce un défi ? Mon sang, d’amour est ivre
Mon corps est un glacier, brûlant, prêt à le suivre
Vicomte débauché requiert l’absolution.

Ma pudeur qui blêmit frôle le  vermillon
Son regard me soumet, je veux baiser sa bouche
Me laisser allonger tendrement sur sa couche
Valmont transfiguré aux feux de la passion.

Mes mains tremblent pourtant, mon front pâle s’anime
Je l’aime et ne saurai plus longtemps le celer 
Ignorer la missive ou bien capituler ?
Toute à lui je serai, cette nuit anonyme.

 

 

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Les mots secrets

J’aurais aimé

Enluminer un bel ouvrage
Pour nos deux âmes en voyage,
Un port sacré, un port d’ancrage,
Un conte de fées d’un autre âge…

J’aurais aimé

Mais tu connais déjà l’adage :
Mon coeur à moi a fait naufrage
Brasier ardent à l’allumage,
Eclair d’adieu un soir d’orage.

J’aurais aimé

Mais le large dans son sillage
T’emporte au loin comme un mirage
À l’ancre de nouveaux rivages
L’Amour lové dans ton bagage

J’aurais aimé

Te dévêtir de ton nuage
Avec de fous baisers volages
L’arbre passion et ses ramages
L’espoir hissé à l’abordage

J’aurais aimé

Tes mots sucrés sur mon corsage,
Fusion de peaux, sublime alliage,
Fondu de deux corps sans ombrage
Nus sur l’île des Lotophages…

J’aurais aimé…
Mais ces mots sont la serrure d’un sarcophage.

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